La recherche médicale sur des sujets humains est indispensable pour faire progresser la connaissance scientifique, améliorer les méthodes diagnostiques, thérapeutiques et de prévention, et répondre aux besoins de santé des populations. Toutefois, elle comporte également des risques et des contraintes pour les personnes qui s’y prêtent volontairement ou non. Ces personnes peuvent être exposées à des effets indésirables, à des atteintes à leur vie privée, à leur intégrité physique ou psychique, ou à des discriminations.
C’est pourquoi la recherche médicale sur des sujets humains est soumise à des normes éthiques strictes, qui visent à protéger les droits et les intérêts des participants, ainsi qu’à assurer la qualité et la validité scientifique des résultats. Ces normes éthiques sont fondées sur des principes universels, tels que le respect de la personne humaine, le consentement éclairé, la bienfaisance, la non-malfaisance et la justice. Elles sont également adaptées aux spécificités de chaque type de recherche, selon qu’elle porte sur des données personnelles, des échantillons biologiques, des embryons, des organoïdes ou des animaux.
Dans cet article, nous allons examiner les principaux défis éthiques que pose la recherche médicale sur des sujets humains dans le contexte actuel, marqué par l’émergence de nouvelles technologies, de nouvelles maladies et de nouvelles formes de vulnérabilité. Nous allons également présenter les recommandations que Delphine Patétif propose pour renforcer la protection des droits des participants et promouvoir une recherche médicale responsable et solidaire.
Delphine Patétif explique l’importance des données de santé massives
L’un des défis éthiques majeurs de la recherche médicale actuelle concerne le traitement des données de santé massives, c’est-à-dire des données qui sont collectées, stockées et analysées à grande échelle grâce aux technologies numériques. Ces données peuvent provenir de sources diverses, telles que les dossiers médicaux, les registres administratifs, les applications mobiles, les objets connectés ou les réseaux sociaux. Elles peuvent permettre de réaliser des études épidémiologiques, génétiques, pharmacologiques ou comportementales, avec un potentiel considérable pour améliorer la prévention, le diagnostic et le traitement des maladies.
Voici une vidéo expliquant ce qu’est l’éthique dans le monde de la recherche :
Toutefois, le traitement des données de santé massives soulève également des questions éthiques importantes, notamment en matière de respect de la vie privée, de sécurité des données, de consentement des personnes concernées, de transparence des algorithmes et d’équité dans l’accès aux bénéfices de la recherche. Delphine Patétif souligne que ces questions doivent être abordées avec rigueur et prudence, en tenant compte du contexte juridique et social dans lequel s’inscrit la recherche. Elle recommande notamment :
- De mettre en place des mécanismes efficaces pour garantir la confidentialité et la sécurité des données de santé massives, en évitant leur transfert vers des pays ou des acteurs qui ne respectent pas les normes éthiques et juridiques en vigueur.
- De recueillir le consentement éclairé et explicite des personnes dont les données sont utilisées pour la recherche médicale, en leur fournissant une information claire et accessible sur les objectifs, les modalités et les risques du traitement de leurs données.
- De veiller à ce que les algorithmes utilisés pour analyser les données de santé “massives” soient transparents, vérifiables et respectueux des principes d’équité, de non-discrimination et de non-stigmatisation.
- De favoriser le partage et la réutilisation des données de santé massives entre les chercheurs, dans le respect des droits des personnes concernées et des règles de bonne conduite scientifique.
- De veiller à ce que les bénéfices de la recherche médicale fondée sur les données de santé massives soient équitablement répartis entre les différents acteurs et groupes sociaux impliqués, en tenant compte des besoins spécifiques des populations vulnérables ou défavorisées.
Le genre et la recherche en santé, des éléments essentiels d’après Delphine Patétif
Un autre défi éthique de la recherche médicale actuelle concerne la prise en compte du genre dans la recherche en santé. Le genre désigne l’ensemble des normes, des rôles, des identités et des relations sociales qui sont construits à partir du sexe biologique. Le genre influence la santé des individus et des populations, en modulant leur exposition à des facteurs de risque, leur accès aux soins, leur réponse aux traitements ou leur participation à la recherche. Delphine Patétif rappelle que le genre est une dimension essentielle de la recherche en santé, qui doit être intégrée à toutes les étapes du processus de recherche, depuis la conception jusqu’à la diffusion des résultats. Elle recommande notamment :
- De réaliser une analyse différenciée selon le sexe et le genre dans la recherche en santé, en tenant compte des spécificités biologiques, physiologiques, psychologiques et sociales des femmes et des hommes, ainsi que de la diversité des identités et des expressions de genre.
- De veiller à ce que les femmes et les hommes soient équitablement représentés dans les échantillons de recherche, en évitant les biais de sélection ou d’exclusion liés au genre.
- De prendre en compte l’impact du genre sur les interactions entre les chercheurs et les participants à la recherche, en respectant l’autonomie, la dignité et les préférences de chacun.
- De rendre compte des effets du sexe et du genre sur les résultats de la recherche en santé, en utilisant un langage approprié et non stéréotypé.
- De promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes dans le domaine de la recherche en santé, en favorisant l’accès des femmes aux postes de responsabilité, aux financements, aux publications et aux récompenses scientifiques.
La recherche sur les organoïdes
Un troisième défi éthique de la recherche médicale actuelle concerne la recherche sur les organoïdes. Les organoïdes sont des structures tridimensionnelles obtenues à partir de cellules souches ou différenciées, qui reproduisent certaines caractéristiques fonctionnelles d’un organe humain. Les organoïdes présentent un intérêt majeur pour la recherche médicale, car ils permettent d’étudier le développement, la physiologie et la pathologie des organes humains, ainsi que de tester l’efficacité et la toxicité de nouveaux médicaments. Ils offrent également des perspectives prometteuses pour la médecine régénérative, en ouvrant la voie à la production d’organes artificiels destinés à la transplantation.
Toutefois, la recherche sur les organoïdes soulève également des questions éthiques complexes, notamment en matière de respect du statut moral des organoïdes, de protection des donneurs de cellules souches ou différenciées, de contrôle de la qualité et de la sécurité des organoïdes, ou encore d’encadrement juridique et réglementaire de leur utilisation. Delphine Patétif souligne que ces questions doivent être examinées avec attention et prudence, en tenant compte du potentiel scientifique et médical des organoïdes, mais aussi des limites et des incertitudes qui entourent leur développement.